Une popularité croissante

Les chiffres nous prouvent pourtant que luxe et e-commerce sont loin d’être incompatibles. Les achats d’articles de luxe sur Internet, qui s’élèvent environ à 9 milliards d’euros par an, ont été multipliés par dix en une décennie et connaissent une croissance trois fois plus forte que les transactions en boutiques. « D’ici à 2018, ils pèseront entre 18 et 22 milliards d’euros, soit 6 à 7% du marché », souligne David Klingbeil (H.12)), cofondateur du Dymant.com. Si la parfumerie, le prêt-à-porter et la maroquinerie mènent la danse, les produits les plus onéreux se vendent désormais également par le canal numérique. « L’e-commerce est une nécessité aujourd’hui, nos clients ne comprendraient pas qu’on les empêche d’acheter sur Internet », juge Antoine Lacroix, directeur digital du joailler Van Cleef & Arpels qui a inauguré son site d’e-commerce en 2012 aux Etats-Unis et au Japon, puis l’an dernier en Europe – il était l’invité de la deuxième Master Class « Luxe & Digital » organisée début juin (voir encadré). Jusque-là sceptiques, les marques Baccarat, Piaget, Cartier, et plus récemment Chanel et Jean-Paul Gaultier, ont toutes succombé à la tentation. Ces derniers mois, ce sont Guerlain, Dior et Puiforcat qui ont fait évoluer leurs sites pour permettre aux clients d’acheter directement leurs produits depuis leur ordinateur, leur tablette ou leur smartphone. Autre signe qui ne trompe pas, le panier moyen ne cesse d’augmenter, d’autant que la catégorie des seniors, une clientèle de choix dans le luxe, est en pleine expansion. « Aux Etats-Unis, certaines transactions dans la joaillerie s’élèvent à plusieurs centaines de milliers d’euros ! », s’étonne William Porret (E12), directeur associé du cabinet ENORA Consulting et coauteur du livre blanc « Luxe 3.0 ».

Il faut dire que la technologie a évolué et offre désormais une esthétique de qualité, susceptible de convaincre les plus réfractaires. « L’excellence fait partie des valeurs fortes de Van Cleef & Arpels, et Internet ne pouvait pas déroger à la règle, témoigne Antoine Lacroix. Il a fallu lever des obstacles psychologiques en interne avant de lancer notre activité e-commerce. Sur Internet, toutes les marques sont à égalité. Certains de nos collaborateurs craignaient que cela affecte notre capital immatériel. » La marque a su mettre le site au même niveau d’exigence que ses boutiques en reproduisant les codes de la maison et en agrémentant les pages de nombreux articles qui racontent l’histoire de Van Cleef et les procédés de fabrication. La « salle d’inspiration » d’Hermès (lesailes.hermes.com/fr), riche en couleurs et en contenus créatifs, constitue un autre modèle du genre.